Nikolaus Adam Strungk possédait, comme bien des musiciens du XVIIème siècle, plusieurs cordes à son arc : il était certes compositeur, mais aussi violoniste et organiste. C'est pourtant comme fondateur, en 1693, du premier Opéra de Leipzig, qu'il restera dans l'histoire. Il en sera le premier directeur, et y fera d'ailleurs donner un bon nombre de ses propres œuvres, tout comme le prolifique Georg Philip Telemann qui sera son successeur, mais qui n'empêchera pas la faillite de l'institution en 1720. Leipzig accueillera ensuite des troupes italiennes, avant que la vogue des opéras allemands n'oblige la ville à se doter d'un nouveau théâtre en 1766.
Le Städtisches Theater sera, lui, inauguré en 1817. Sous l'impulsion d'actifs directeurs, dont le plus célèbre est certainement E.T.A. Hoffmann, on y joue un répertoire qui va de Mozart à Weber (création allemande d'OBERON après la création mondiale de Covent Garden). En 1840, alors que Mendelssohn dirige les activités de l'Orchestre du Gewandhaus, celui-ci deviendra l'orchestre défasse attitré de l'Opéra et le restera jusqu'à aujourd'hui.
En 1850, Schumann vient y diriger les premières représentations de son opéra GENOVEVA, et en 1867, un nouvel édifice est construit sur l'Augustusplatz, en face de l'emplacement où sera aussi bâti le Nouveau Gewandhaus. Ardent défenseur de l'art lyrique allemand, l'Opéra de Leipzig prendra rapidement fait et cause pour l'œuvre de Richard Wagner.
La troupe monte une des premières intégrales du RING avec les décors et costumes du festival de Bayreuth, et s'empresse d'aller faire découvrir la prodigieuse tétralogie hors d'Allemagne : Covent Garden, La Fenke ou La Monnaie accueilleront ses productions avec enthousiasme. Cette culture wagnérienne sera défendue par Arthur Nikisch et par son jeune assistant, Gustav Mahler, mais n'empêchera jamais l'institution d'innover, et même de devenir un des temples de la musique moderne dans la première moitié de notre siècle : on y entendra, entre autres premières mondiales, les accents jazzy du JONNY SPIELT AUF de Krenek (1927) et ceux plus grinçants de Kurt Weill et Bertolt Brecht dans GRANDEUR ET DECADENCE DE LA VILLE DE MAHAGONNY (1930).
L'Opéra sera détruit pendant la Seconde Guerre Mondiale, et devra attendre 1960 pour être reconstruit, sinon à l'identique, du moins en respectant la forme classique de l'ancien théâtre.